Crowdfunding Economie 16 January 2020

Vers une véritable ambition Européenne pour le crowdfunding ?

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Alors que le Brexit deviendra sans doute bientôt une réalité, l’intégration européenne avance par ailleurs sur d’autres fronts. Il en est ainsi du financement participatif. À la suite d’un accord de principe intervenu fin décembre 2019 entre la Commission, le Conseil et le Parlement Européen, le crowdfunding européen, pourrait bientôt être doté d’un véritable cadre transfrontalier via le label d’European Crowdfunding Service Providers (ESCP).


Le constat depuis 2018 de carences au niveau communautaire

Le mouvement en cours est l’aboutissement d’une réflexion dès 2018 liée au plan d’action Européen « Plan Fintech », ayant pour objectif de promouvoir l’innovation, d’améliorer la sécurité et de créer de nouvelles opportunités. Les Fintechs se sont, en effet, imposées comme un véritable mouvement de fonds dans l’industrie des services financiers au plan mondial. Outre des questions relatives à la cyber-sécurité, à l’utilisation du « cloud » ou au développement de l’usage de la « blockchain » pour des marchés financiers plus fluides, le sujet d’un financement participatif pan-européen à rapidement émergé.

plan d'action de promotion des fintechs et du crowdfunding

D’où la proposition « Crowdfunding » de la Commission Européenne de mars 2018, issue de diverses consultations pointant certains obstacles à un développement plus harmonieux du financement participatif en Europe :

"Le financement participatif offre une solution alternative indispensable aux prêts bancaires, qui constituent actuellement la principale source de financement externe pour les petites et moyennes entreprises (PME) […] Le financement participatif est donc crucial car il permet aux entreprises d’exploiter de nouvelles sources de financement. Dans le même temps, il offre des possibilités d’investissement nouvelles aux petits investisseurs et aux consommateurs." Commission Européenne.

Un processus qui pourrait aboutir en 2020

À cette proposition initiale de la Commission, ont succédé des versions adoptées par le parlement, par le Conseil Européen.  Par ailleurs des organismes professionnels tels que l’European Crowdfunding Network (au sein duquel siègent plusieurs plateformes pan-européenne) ont par ailleurs cherché à faire une synthèse de ces différents travaux.

Il existe déjà des règlements européens transnationaux tels que la directive DSP 2 de 2018 pour les services de paiement (qui ont permis le développement de start-ups internationales telles Qonto ou iBanFirst), ou bien MiFID 2, dans le domaine du conseil et la gestion d’actifs. De même pour la directive européenne pour les prêts à la consommation.

Concernant le crowdfunding, il persiste à date une disparité de traitement dans les différents états membres : entre ceux (au premier rang desquels la France) qui ont mis en place un cadre légal précis, ceux qui ont émis des directives nationales, ou ceux qui font référence à des règles générales,  régissant la pratique bancaire et financière Europe.

L’accord intervenu au Parlement européen le 18 décembre 2019, en vue de la création du label européen « European Crowdfunding Service Providers (ESCP) for Business » crée un guichet unique encadré par l’Autorité Européenne des Marchés Financiers (AEMF). Il permettra une fois entériné de faciliter le développement d’un marché unique transfrontalier.

Quelles pistes envisagées par le nouveau statut ECSP ?

Le nouveau statut (dont le vote pourrait intervenir au premier trimestre 2020) viserait ainsi à : surmonter les obstacles aux activités transfrontalières, offrir davantage de possibilités aux investisseurs européens tout en garantissant un niveau élevé de protection, définir les exigences que les prestataires de services de financement participatif devront satisfaire pour obtenir l’agrément sous l’égide de AEMF.

Selon l’association Financement Participatif France, le nouveau cadre (qui ne s’appliquera pas aux plateformes de « crowdgiving ») pourrait apporter notamment les nouveautés suivantes :

  • Une unification des règles pour le « crowdlending » et le « crowdequity »
  • Le régime est fondé sur un statut de réception transmission d’ordres (RTO) et non pas de conseil, contrairement au régime français actuel.
  • Un seuil de 5M€ par émetteur sur 12 mois (ce qui est inférieur aux 8M€ des plateformes françaises de statut CIP)
  • L’introduction des concepts d’investisseurs « sophistiqués » et « non-sophistiqués » avec des mesures spécifiques (test de connaissance pour les investisseurs non-sophistiqués et information renforcée sur les risques. Limite (modulable) par projet à1000€ ou 5% de leurs actifs, délai de rétraction de 4 jours)
  •  Les critères pour être un « investisseur sophistiqué » seraient, une personne morale avec au choix : des fonds disponibles de 100k euros, un chiffre d’affaire > 2Me ou un total de bilan > 1me. Pour les individus, au moins deux des conditions suivantes : un revenu brut annuel > 60ke ou un patrimoine financier >100ke, une expérience dans le secteur financier d’au moins 1 an, un historique de transaction significatif d’au moins 10 opérations par trimestre au cours de l’année écoulée.
  • La communication d’un KIIS (Key investment Information Sheet) sur le modèle du DIRS des plateformes d’equity, 7 jours avant la mise en ligne d’un projet.
  • Une diversification possible des sources de revenue des plateformes au-delà des commissions sur les opérations de financement.

Sans révolutionner les choses, ce nouveau cadre, une fois mis en place, devrait permettre un meilleur développement du financement participatif comme classe d’actif en Europe, à l’instar de ce qui a été observé au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou en Chine. Nous dirigerons nous vers un label européen du crowdfunding ? À suivre !

Publication originale de le 16 January 2020 mise à jour le 04 November 2021