Pour les professionnels de l'immobilier, le financement est sans doute plus que jamais devenu le nerf de la guerre. Certes, le "sourcing" des meilleures opportunités, l'accès au foncier, la définition d'un produit attractif à coût maîtrisé et la commercialisation restent également des étapes clés. Cependant, in fine, rien de tout cela ne pourra être réalisé sans un financement adapté. Avec la hausse des taux et les restrictions que les banques ont apportées à leur politique d'octroi de crédits ces derniers mois, de nombreux projets sont mis à l'arrêt.
Par ailleurs, les fonds propres des opérateurs ne sont pas extensibles à l'infini. C'est là que le crowdfunding immobilier a plus que jamais un rôle à jouer. Dans un environnement par ailleurs plus incertain, une offre de financement semble se développer fortement : l'hypothèque de premier rang ou dette "senior secured".
Elle permet de remplacer la banque en accédant à des sûretés réelles directement sur des actifs. Elle permet de combiner un niveau de risque plus maîtrisé pour les prêteurs avec un coût de financement pour les emprunteurs plus favorable que dans le cas d'une "dette junior". Comment cela fonctionne-t-il précisément ?
Au départ, le financement participatif ou "crowdfunding" a pu se développer grâce à la mise en place d'un cadre légal adapté. A l'origine, il était surtout destiné à soutenir des projets culturels (sans contreparties financières obligatoires). Cependant des offres plus financières sont rapidement apparues permettant de constituer une offre de financement alternatif structurée : d'abord en action (equity) puis de manière croissante en dette obligataire.
Depuis, de nombreux professionnels de l'immobilier (promoteurs, marchands de biens, foncières) ont intégré cette offre de financement obligataire non cotée et non dilutive. S'il s'agissait à l'origine de prêts complémentaires à l'intervention de banque (financement "junior"), l'offre du "crowdlending immobilier" à également évolué pour s'adapter à la conjoncture.
Dans un contexte où les financement bancaires se font plus rares pour différentes raisons (bilans bancaires, taille de ticket trop faible, hausse des taux, contraintes réglementaires et délais de traitement) des offres de financement "senior secured" adossées à des suretés réelles sont apparues via le crowdfunding avec certains avantages :
Face au manque de financements bancaires, nombres d'opérateurs immobiliers sont en effet contraints d'abandonner ou de reporter certains projets, d'engager plus de fonds propres - avec les limites de ce système - ou bien de laisser sur la table une grande partie de leur marge au profit d'éventuels co-investisseurs.
Dans ce contexte le crowdfunding immobilier offre une réelle solution alternative. Elle repose sur un financement obligataire - généralement in fine - assorti le plus souvent de certaines garanties :
Pour se sécuriser les prêteurs vont éventuellement exiger une caution ou une GAPD (Garantie à Première Demande). Il s'agit de "garanties de tiers". La caution n'est pas forcément idéale dans la mesure où plusieurs créanciers peuvent avoir ces mêmes exigences. Difficile parfois d'avoir une vue globale sur les engagements que cela suppose au regard du montant résiduel de la dette. S'il s'agit d'une caution personnelle, elle sera sans doute établie au vu d'une base patrimoniale existante mais ce n''est pas une solution totalement "waterproof".
L'hypothèque permet de disposer d'une sûreté réelle sur l'actif financé. En présence d'une banque, les prêteurs en crowdfunding auront souvent une garantie de second rang ou "junior". A la clé une rémunération plus attractive mais un niveau de risque qui augmente fortement. L'offre senior permet de financer directement en l'absence de banque en prenant une garantie sur l'actif.
L’hypothèque est un outil relativement flexible. Elle porte par ailleurs sur un actif immobilier dont il est à priori possible de fixer la valeur vénale et la liquidité de manière relativement objective et documentée. Elle implique l'intervention d'un notaire (voire d'un fiduciaire) ce qui en fait un outil très sécurisant pour tout le monde :
Organiser un financement en crowdfunding immobilier avec une garantie hypothécaire présente plusieurs avantages :
Il s'agit d'un montage assez simple et robuste. En cas de défaut les créanciers pourrons mettre en jeu l'hypothèque pour récupérer leurs fonds via la vente du bien. Bien sûr cela n'est pas vraiment adapté pour une opération ou l'actif devra subir beaucoup de travaux ou sur des opérations de pure promotion à un stade peu avancé. Cependant les marchands de biens plus particulièrement, y trouverons sans doute un intérêt certain.
Si la valeur de marché du bien envisagée est cohérente, qu'il existe par ailleurs un apport minimum en fond propre pouvant fournir un coussin de sécurité avec des ratio LTV (Loan to Value) ou ratio LTC (Loan to Cost) maitrisés : tous les voyants seront au vert pour obtenir le financement recherché.
Ainsi, un ratio de LTV de 80% signifie que le nominal de la dette pourra être remboursé, même en cas de revente du bien à un prix 20% au-dessous de sa valeur de marché estimée.
Côté préteurs le montage via une hypothèque de premier rang offre l'avantage de la simplicité (un seul interlocuteur), de la sécurité et d'un risque plus maîtrisé.
La prise d'une hypothèque permet aux créanciers de disposer d'un rang élevé dit "senior secured". En effet, le rang est fixé contractuellement :
A noter par ailleurs qu'il s'agit d'une solution rapide et flexible. Les fonds prêtés avec une hypothèque peuvent être alloués au développement de différents projets sans toujours concerner directement l'actif mis en hypothèque. Donner en hypothèque un actif de bonne qualité (actif existant détenu dans une localisation prime par exemple) permettra à l'emprunteur d'obtenir rapidement son financement quitte à ce que les fonds obtenus soient consacrés au développement de nouvelles opérations.
Par ailleurs l'actif mis en jeu ne sera vendu qu'en cas de défaut. Il permet pour l'emprunteur de mobiliser cet actif sans avoir à le liquider dans l'immédiat et d'obtenir des liquidités tout en le conservant dans son patrimoine (sauf bien sûr en cas de défaut sur le financement obtenu et de mise en jeu de l'hypothèque...).
En se substituant à la banque le prêteur prend un risque réfléchi. Il ne profitera pas du gain parfois important lié à une opération classique en direct mais d'un gain capé via le taux d'intérêt dans le cadre d'une démarche assez encadrée.
Néanmoins, la mise en jeu de l'hypothèque, pour garder tout son sens, doit pouvoir se faire sans accros en cas de défaut.
A ce titre, combiner hypothèque et fiducie permettra de s'assurer que chacun (emprunteur et créancier) rempliront correctement leur engagement le jour venu. La fiducie-sûreté (sur titre ou sur actif) est ainsi une convention tripartite entre :
Cela permet aux investisseurs d'améliorer le profil de risque de l'opération et de répondre à la problématique du créancier en améliorant le couple risque/rendement.
Côté emprunteur, elle permet de se présenter sous son meilleurs jour, et de maximiser ainsi les chances d'obtenir un financement adapté. Avec des conditions les plus favorables dans un cadre juridiquement très lisible.
La dette « senior-secured » est un produit d’investissement qui offre une rémunération moins élevée que la « junior-secured » ou que la dette « non-secured », mais qui présente également un profil de risque moins élevé :
En résumé, les prêts immobiliers seniors sécurisés (Senior Secured Loans) offrent plusieurs avantages pour les emprunteurs immobiliers, notamment :
Publication originale de le 01 June 2023 mise à jour le 27 February 2024